Cette approche a été
présentée par Irving Fisher en 1930 dans le but de donner un fondement
microéconomique à la fonction de consommation macroéconomique. D’inspiration
néoclassique, cette théorie suppose des agents rationnels qui agissent dans un
environnement de concurrence parfaite. Ces agents raisonnent en terme réel et
adoptent un comportement calculateur de maximisation de la fonction objectif
sous contrainte.
L’hypothèse de base de cette théorie est que la finalité de la consommation des
ménages est la maximisation de l’utilité. Mais il ne s’agit pas de maximiser
l’utilité pour une période donnée, mais plutôt pour toute la durée de vie.
Autrement dit, un ménage serait prêt à sacrifier une certaine quantité de
consommation au présent en vue d’avoir une quantité plus élevée au futur
et inversement.
Si l’espérance de vie d’un ménage représentatif est de n années, ses revenus
disponibles réels annuels anticipés sont : Y1, Y2, Y3, …,Yn, et ses consommations
réelles annuelles sont : C1, C2, C3, ……,Cn, alors son plan de consommation intertemporel
est celui qui maximise son utilité sous contrainte de richesse.
A) LE PLAN DE CONSOMMATION INTER-TEMPOREL :
Pour
simplifier notre raisonnement, nous supposons un ménage représentatif :
-
dont l’espérance de vie est de deux périodes : le présent (période1) et le
futur (période 2),
-
qui n’a pas de richesse initiale et qui ne lègue rien à ses héritiers.
Supposons
que ce ménage a une préférence pour le présent (ρ) c’est-à-dire qu’entre
une unité de consommation au présent et la même unité au futur, il préfère
consommer au présent. Le taux d’intérêt réel (r) est la récompense de la
renonciation au présent, c’est-à-dire la récompense de l’abstinence. Autrement
dit, ce ménage obtiendrait (1 + r) unités de consommation au futur s’il accepte
de renoncer à une unité de consommation au présent.
Ce ménage peut
donc, à chaque période, avoir une consommation inférieure à son revenu courant
et épargner le reste ou avoir une consommation supérieure à son revenu courant
et emprunter la différence.
Sous ces
hypothèses, l’objet de cette section est d’expliquer les mécanismes
d’élaboration du plan de consommation inter-temporel.
a) La notion de richesse:
Nous
désignons par richesse d’un ménage (W), la somme de ses revenus disponibles
réels actualisés. L’équation de richesse :
b) La contrainte budgétaire:
Par
contrainte budgétaire d’un ménage, nous désignons l’égalité entre ses
ressources et leur emploi. Il s’agit, ici, de l’égalité entre la somme de ses
revenus disponibles réels actualisés et la somme de ses consommations annuelles
réelles actualisées.
Cette
dernière relation est l’équation de la contrainte budgétaire ou de richesse.
Nous remarquons que c’est une droite décroissante de pente – (1+r).
c) La fonction d’utilité:
L’objectif
du ménage représentatif est de maximiser sa fonction d’utilité inter temporelle
:
U = U( C1 , C2)
U = U( C1 , C2)
Cette
fonction peut être représentée, dans un espace à trois dimensions, par une
colline d’utilité ou, dans un plan, par une carte d’indifférence qui représente
l’ensemble des courbes d’indifférence.
Une courbe
d’indifférence intemporelle est le lieu géométrique de toutes les combinaisons
de consommation (C1 , C2) qui donnent le même niveau d’utilité.
d) L’optimum:
Maximiser
la fonction d’utilité sous la contrainte de richesse revient à maximiser
l’équation de Lagrange suivante :
Le
TMSI (le taux marginal de substitution inter temporel) mesure la
quantité de consommation future que le ménage serait prêt de céder pour avoir
une unité supplémentaire de consommation présente et garder le niveau d’utilité
constant. C’est le taux d’échange subjectif entre la consommation future et la
consommation présente.
(1+r) mesure la valeur future d’une unité de consommation
présente. C’est le taux d’échange objectif entre la consommation future et la
consommation présente. Autrement dit, l’optimum est tel que le taux d’échange
objectif est égal au taux d’échange subjectif :
Cet
équilibre implique quelques suggestions et remarques :
- Contrairement à l’hypothèse de Keynes, la consommation des ménages ne dépend pas uniquement du revenu disponible, elle dépend également du taux d’intérêt.
- Cet équilibre peut déboucher sur deux catégories
de ménages :
o un ménage créditeur caractérisé par une épargne positive, c’est-à-dire par une consommation présente inférieure au revenu présent : C1* < Y1 ⇔ S > 0.
o un ménage débiteur caractérisé par une épargne négative, c’est-à-dire par une consommation présente supérieure au revenu présent : C1* > Y1 ⇔ S < 0. - Comme le ménage considéré ne lègue rien à ses héritiers, sa richesse doit être épuisée à la fin de la deuxième période, c’est-à-dire qu’il ne doit avoir à la fin de sa vie ni une épargne, ni des dettes. Autrement dit son épargne à la deuxième période est égale à moins son épargne de la première période.
B) DÉPLACEMENT DE L’ ÉQUILIBREUR:
Nous
avons montré ci-dessus que la consommation dépend du revenu disponible et du
taux d’intérêt, mais nous n’avons pas précisé la nature de la relation
(croissante ou décroissante). Pour ce faire, nous devons analyser les
conséquences des variations du revenu disponible et du taux d’intérêt,
lesquelles variations se traduisent par un déplacement de l’équilibre.
a) variation des revenus disponibles et déplacement de l’équilibre:
Toute variation des
revenus disponibles (r restant constant) se traduit par une variation dans le
même sens de la richesse. La droite budgétaire va subir un déplacement
parallèle, puisque la pente [– (1+r)] ne varie pas, et par conséquent
les consommations présentes et futures ainsi que l’épargne vont aussi varier
dans le même sens :
b) variation du taux d’intérêt et déplacement de l’équilibre:
Toute
variation du taux d’intérêt réel (Y1 et Y2 restant constants) implique un
déplacement non parallèle de la droite budgétaire et par la même un déplacement
de l’équilibre. Ce déplacement de l’équilibre résulte d’un double effet : un
effet substitution et un effet richesse.
- L’effet richesse résulte du fait que le ménage va se sentir plus riche ou plus pauvre selon le sens de variation du taux d’intérêt et selon que l’agent soit débiteur ou créditeur : une augmentation du taux d’intérêt enrichit l’agent créditeur et appauvrit l’agent débiteur et inversement. Et tout enrichissement (appauvrissement) implique une augmentation (une baisse) de C1 et de C2.
- L’autre effet de la variation du taux d’intérêt est la modification de la récompense de la renonciation au présent, c’est à dire du prix de C1 en terme de C2. Ceci se traduit par un effet de substitution qui est le mêmes quelle que soit la situation de l’agent : une augmentation du taux d’intérêt incite à l’épargne et a donc un effet négatif sur la consommation présente et positif sur la consommation future, et inversement.
- Les effets conjugués (effet global) sont donc relativement complexes sur les consommations présentes et futures et sur l’épargne. Ils dépendent du sens de variation du taux d’intérêt et de la situation de l’agent. Toutefois, les tenants de ce modèle font l’hypothèse que lorsque l’effet revenu et l’effet substitution ne vont pas dans le même sens, c’est ce dernier qui l’emporte de sorte que, par exemple, si l’effet revenu est positif et l’effet substitution est négatif, l’effet global sera négatif.
Le tableau suivant
récapitule les conséquences des variations du taux d’intérêt réel selon la
situation de l’agent.
Remarque : Pour représenter graphiquement l’effet substitution, il faut créer un point intermédiaire en traçant une droite parallèle à la nouvelle droite budgétaire, tangente à la courbe d’indifférence initiale. Le graphique suivant illustre le cas d’une augmentation du taux d’intérêt pour un agent créditeur.
c) Conclusion:
Si nous supposons
que l’effet substitution l’emporte sur l’effet revenu, nous pouvons conclure
que l’approche de Fisher établit une relation croissante entre la consommation
présente et la richesse (la richesse elle-même est fonction croissante des
revenus) et décroissante entre la consommation présente et le taux d’intérêt
réel.
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